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Entre recommandations et certification : comment la Suisse structure la biodiversité dans l’aménagement urbain
Des outils pédagogiques nombreux, mais encore sans cadre certifiable
La Suisse s’est dotée d’une large palette d’outils pour favoriser la biodiversité dans l’urbanisme : recommandations, labels, checklists et guides techniques. Mais cette richesse masque une limite structurelle : la plupart de ces dispositifs relèvent de la sensibilisation ou du conseil méthodologique, non de la certification indépendante. C’est tout l’enjeu du passage, désormais nécessaire, entre la recommandation volontaire et la preuve écologique mesurable.
1. Une mosaïque d’outils de référence
Ces dernières années, les collectivités suisses ont multiplié les approches pour traduire la biodiversité dans le projet urbain. Parmi les plus reconnues :
- le Guide OFEV sur la biodiversité dans les zones bâties,
- la norme SIA 2066 sur la conception favorable à la biodiversité,
- la Toolbox Nature en milieu urbain,
- le programme BioValues,
- ou encore le référentiel Espazium, qui agrège les bonnes pratiques.
Ces instruments ont un rôle déterminant : ils éduquent, orientent et harmonisent les réflexes des concepteurs et maîtres d’ouvrage. Mais ils ne mesurent pas la performance écologique effective. Aucun n’est adossé à un organisme certificateur accrédité ni à un protocole d’audit indépendant.
2. Le point commun de ces démarches : la pédagogie
La plupart de ces outils fonctionnent selon un schéma de guidance : ils fournissent des recommandations, parfois des grilles d’auto-évaluation, et encouragent l’amélioration continue. Cette logique a fait ses preuves dans la diffusion des bonnes pratiques. Mais elle atteint aujourd’hui ses limites : elle ne permet ni la comparabilité des projets, ni la traçabilité des résultats.
En Suisse comme ailleurs, la transition vers la mesure écologique normalisée devient indispensable pour crédibiliser les politiques publiques, les appels d’offres et la finance durable.
3. Le Biodiversity Performance Score et Effinature : de la recommandation à la certification
Le Biodiversity Performance Score (BPS), développé par IRICE, prolonge la logique des outils suisses tout en y ajoutant la dimension de mesure et de vérification indépendante. Il évalue la fonctionnalité écologique réelle d’un site à partir de plus de 50 critères, regroupés en cinq familles :
- Préservation du sol,
- Développement du patrimoine végétal,
- Soutien à la faune locale,
- Réduction des impacts du projet,
- Gestion écologique du site.
Chaque résultat est exprimé par un score de performance écologique, fondé sur des données mesurées et vérifiées. Ce score constitue la colonne vertébrale scientifique de la certification Effinature, également portée par IRICE et accréditée ISO/CEI 17065. Ainsi, le BPS mesure, Effinature certifie. Les deux outils traduisent les recommandations en preuves tangibles et en résultats opposables, dans un cadre institutionnel reconnu.
4. De la guidance à la gouvernance : l’évolution nécessaire
Les démarches suisses démontrent la pertinence de la phase de sensibilisation. Mais la crédibilité écologique passe désormais par trois conditions :
- une méthode vérifiable,
- un organisme indépendant,
- une reconnaissance institutionnelle.
C’est le rôle du BPS et de la certification Effinature, qui traduisent les recommandations en indicateurs audités. Ce passage de la pédagogie à la gouvernance scientifique marque la nouvelle étape de maturité de la biodiversité urbaine.
5. En conclusion
La Suisse a posé les fondations d’une culture écologique exemplaire, fondée sur la coopération et la méthode. Mais sans cadre de certification accrédité, ces outils restent au stade de l’intention. Le Biodiversity Performance Score et la certification Effinature comblent ce manque : ils transforment la recommandation en preuve, la bonne pratique en valeur mesurée.
C’est ce glissement – du conseil à la vérification – qui fait entrer la biodiversité dans l’ère de la performance certifiable.
