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Le vocabulaire utilisé dans le domaine de la construction et de l’environnement prête souvent à confusion. Les expressions « label », « certification », « habilitation » ou « accréditation » sont régulièrement employées comme si elles étaient équivalentes, alors qu’elles reposent sur des principes, des obligations et des niveaux de contrôle très différents. Cet article clarifie ces distinctions et rappelle le cadre juridique de l’accréditation, souvent mal compris et parfois revendiqué à tort.
1. Quatre catégories d’outils : une hiérarchie claire
1.1. Labels d’État : reconnaissance publique
Les labels d’État sont :
- définis ou validés par un ministère ou une autorité publique,
- adossés à un cadre réglementaire,
- reconnus institutionnellement.
Ils valorisent une démarche ou une politique publique. Ils ne constituent pas une certification et n’impliquent pas de contrôle par un organisme tiers indépendant.
1.2. Labels privés : engagement volontaire
Les labels privés sont :
- créés par une association, un organisme professionnel ou une entreprise,
- structurés autour d’une charte interne,
- délivrés sur la base d’une démarche volontaire.
Ils valorisent une intention ou une démarche sectorielle, mais ne reposent sur aucune exigence normative. Ils ne sont pas soumis à la surveillance d’un organisme national d’accréditation.
1.3. Certifications privées non accréditées
Certaines organisations délivrent des “certifications” sans accréditation. Il s’agit alors :
- d’un système interne,
- sans surveillance indépendante,
- sans contrôle externe,
- sans obligation normative formelle.
La valeur d’une telle certification dépend exclusivement du sérieux de l’organisme qui la délivre.
1.4. Certifications accréditées : le niveau maximal de confiance
Une certification accréditée repose sur :
- une méthode publique,
- une évaluation par un organisme tiers,
- une décision indépendante,
- une accréditation délivrée par l’organisme national d’accréditation (en France : le COFRAC),
- la conformité à une norme internationale (ex. ISO 17065).
C’est le niveau le plus élevé de reconnaissance, car il est placé sous contrôle institutionnel.
2. Comprendre l’accréditation : un terme juridiquement encadré
2.1. Définition juridique
Le terme “accréditation” est strictement défini par le Règlement (CE) 765/2008 :
« Accréditation : attestation délivrée par un organisme national d’accréditation reconnaissant la compétence d’un organisme à réaliser des activités d’évaluation de la conformité. »
Ce texte est directement applicable en France.
Cela implique trois principes :
- Seuls des organismes peuvent être accrédités.
- Une compétence individuelle ne peut jamais être “accréditée”.
- L’accréditation est une reconnaissance institutionnelle, pas interne.
2.2. En France : le monopole du COFRAC
La France applique le règlement européen par un principe clair :
Un seul organisme est habilité à accréditer : le COFRAC.
Ce monopole est inscrit :
- dans le Code de la Consommation (L.433-1),
- dans le décret du 19 décembre 2008.
Aucun organisme privé ou associatif ne peut “accréditer” qui que ce soit.
2.3. Un assesseur ne peut jamais être accrédité
Un assesseur peut être :
- formé,
- habilité,
- évalué,
- reconnu compétent par une association ou une structure privée.
Mais juridiquement :
→ un assesseur n’est pas accrédité ;
→ un assesseur ne peut pas être accrédité ;
→ le terme “accrédité” appliqué à une personne est faux.
L’accréditation porte exclusivement sur :
- l’organisme,
- son système,
- ses processus,
- son impartialité.
2.4. Validation interne vs accréditation : deux réalités opposées
Il est essentiel de distinguer :
Validation interne
- reconnaissance de compétence par une structure privée,
- procédure interne,
- sans surveillance externe,
- sans valeur normative.
Accréditation
- reconnaissance institutionnelle,
- contrôle par l’organisme national,
- audits réguliers,
- exigence d’impartialité,
- conformité à une norme internationale,
- valeur institutionnelle.
La confusion entre les deux induit les acteurs en erreur.
3. Notions de preuve, impartialité et opposabilité
3.1. Chaîne de preuve : une exigence structurante
Une évaluation crédible repose sur :
- des données vérifiables,
- une traçabilité complète,
- des métadonnées,
- une conservation réglementée.
C’est une obligation dans les systèmes accrédités.
3.2. Impartialité : règle fondamentale des normes internationales
Les normes (ISO 17065, ISO 17020, ISO 14065) imposent :
- la séparation stricte entre conseil et évaluation,
- la prévention des conflits d’intérêts,
- une gouvernance indépendante,
- un contrôle externe.
Un évaluateur ne doit pas accompagner un projet sur lequel il se prononce.
3.3. Opposabilité : ce que cela signifie réellement
Une évaluation est opposable lorsque :
- elle repose sur la preuve,
- elle est reproductible,
- elle engage l’organisme,
- elle est contrôlée indépendamment.
4. Conséquences pour les maîtres d’ouvrage et investisseurs
4.1. Sécurisation du projet
La certification accréditée offre :
- un cadre impartial,
- une méthode reconnue,
- une responsabilité engagée.
4.2. Crédibilité auprès des acteurs financiers
Les exigences ESG, la Taxonomie et la CSRD renforcent la demande :
- d’évaluations indépendantes,
- de données vérifiables,
- d’analyses opposables.
4.3. Gestion des risques
Les démarches non normatives peuvent présenter :
- un risque de confusion,
- un manque de traçabilité,
- une absence de surveillance externe.
4.4. Clarté de la communication
La certification permet une communication :
- lisible,
- encadrée,
- vérifiable.
Conclusion
Le paysage des outils environnementaux est varié, mais leur statut et leur valeur ne sont pas équivalents. Les labels d’État, labels privés, certifications privées et certifications accréditées répondent à des logiques distinctes et n’engagent pas les mêmes responsabilités. L’accréditation, strictement encadrée par le règlement (CE) 765/2008, constitue aujourd’hui le niveau maximal de confiance. Elle impose une impartialité, une preuve et une surveillance institutionnelle qui garantissent une fiabilité que ne peuvent offrir ni les labels privés ni les validations internes.
